3 clichés sur le syndrome d'Asperger” - Paul El Kharrat par Brut
Ils sont souvent qualifiés de malades, génies ou associables. Ce sont les personnes atteintes du syndrome d'Asperger. Pour Brut, Paul El Kharrat raconte les clichés auxquels il est confronté.
« Je ne suis en aucun cas malade. J’ai un syndrome autistique qui est ma force au quotidien, mais qui est aussi ma faiblesse. Je ne suis pas atteint de maladie incurable, que ce soit une maladie psychique ou une maladie physique. Non », répète Paul El Kharrat, auteur autiste Asperger. Pour Brut, il explique pourquoi les clichés sur ce syndrome sont faux.
3 clichés sur le syndrome d'Asperger
Le syndrome d’Asperger, c’est une maladie
Je ne dis pas que ça ne nous pourrit pas le quotidien, qu’on a pas l’air de malades quand on est en colère, qu’on est pas énervé de manière 10 fois plus forte que tout un chacun. On a l’air malade pour les autres. Moi-même parfois, je me dis que j’ai l’esprit malade. Je ne me sens pas bien. Mais ce n’est pas une maladie à proprement parler, c’est ça que je veux dire.
Le syndrome d’Asperger c’est, comme son nom l’indique, un trouble envahissant du développement qui fait partie de l’autisme, de l’échelle de l’autisme, du spectre de l’autisme. C’est un syndrome léger, un autisme léger.
Les troubles cognitifs très importants, c’est surtout le syndrome de Kanner, c’est-à-dire la partie assez aggravante de l’autisme. C’est d’ailleurs ce syndrome-là que les gens connaissent le plus sans en savoir le nom. Ils pensent que l’autisme, c’est uniquement ces gens-là, qui sont en dépression en permanence, qui ne s’expriment pas ou par bribes, qui se tapent la tête quand ils sont pas bien.
Les personnes avec Asperger sont des génies
Dans l’autisme Asperger, il y a ce qu’on appelle, mais vraiment au sommet, le syndrome du savant. Par exemple, Kim Peek, qui a donné ses traits à Rainman, le film de 1988 avec Dustin Hoffman et Tom Cruise, était quelqu’un d’assez incroyable qui savait lire deux pages simultanément.
Mais ce n’est pas la réalité de l’autisme, ça. Ce sont des gens qui sortent des sentiers de l’autisme. Ils ont leur petite branche, dans le spectre de l’autisme, qui est l’autisme savant. Mais ils ne sont que quelques-uns, il n’y en a pas beaucoup. Moi, on pourrait penser que je suis à la limite entre un autiste de haut niveau et un autisme savant, mais je ne suis pas autiste savant. Je suis autiste de haut niveau.
Certes, tous les autistes Asperger ne sont pas des autistes de haut niveau, mais moi, je suis hypermnésique, donc je me souviens d’énormément de choses. Je dois prendre conscience des facilités que je peux avoir dans certains domaines, même s’il y a des côtés sombres, comme se souvenir de choses qu’on aimerait oublier.
Les personnes avec Asperger sont asociales
On nous prend pour des gens un peu psychorigides, un peu fous, qui s’adonnent uniquement à une activité… On manque d’empathie aussi, on dit souvent ça. Pour la majorité des gens avec autisme, on est seuls malgré nous. On a une solitude forcée, une solitude malsaine. Malheureusement, on a beaucoup de mal à enclencher une conversation, ce qui fait qu’on reste perpétuellement seul. On se dit : « Allez, on bouge, on y va. » Mais on n’y arrive pas, et les gens ne nous aident pas, parce qu’ils ne viennent pas nous voir. Je ne demande que ça, qu’on vienne me parler, qu’on crée des amitiés, des affinités, qu’on fasse des sorties, qu’on aille au musée.
Je pense que l’autisme mérite un bon mode d’emploi pour les neuro-typiques qui ne nous comprennent pas. Parfois, on n’a pas envie d’être accompagnés. On va le faire savoir directement ou indirectement. On en aura marre, il y aura eu trop de relations sociales, on a envie d’être seuls. Et ça, c’est une solitude saine, parce que c’est une solitude dont on a besoin, qu’on a demandée.
Le plus important pour un sujet Asperger, c’est d’être bien entouré, entouré de personnes qui le comprennent, qui font des efforts pour l’aider et pour le guider à travers ce flou, ce noir continu qu’est la société humaine. Ce n’est pas quelque chose d’évident à comprendre. S’il y a des gens pour les accompagner, qui comprennent la société mieux que nous et qui sont à même de nous l’expliquer, on avancera du bon côté.