Le premier épisode psychotique
Les épisodes psychotiques sont fréquents : environ 3 % de la population en feront l’expérience au cours de leur vie, quel que soit leur milieu socio-économique.
Qu'est-ce qu'un premier épisode psychotique (PEP) ?
On appelle premier épisode psychotique la période au cours de laquelle une personne expérimente ces phénomènes avec une intensité qui impacte son fonctionnement et ce, de façon suffisamment durable (au moins 8 jours).
Le premier épisode survient généralement chez les adolescents et jeunes adultes. La psychose est rare avant la puberté. Elle concerne aussi bien les garçons que les filles mais survient à des âges différents selon le sexe : entre la fin de l’adolescence et la vingtaine pour les garçons, entre 20 et 30 ans pour les jeunes femmes.
Après l’âge de 40 ans, il est rare de faire un premier épisode psychotique.
Le premier épisode psychotique peut s’installer de manière brutale ou de façon insidieuse. Cependant, la plupart des personnes (75%) ont vécu des signes avant-coureurs, parfois appelés symptômes prodromiques. Ces signes sont souvent difficiles à repérer, car, peu spécifiques, atténués ou fluctuants.
Quels sont les principaux symptômes psychotiques ?
Les symptômes varient d’une personne à l’autre et peuvent évoluer au cours du temps chez une même personne.
Pensée modifiée et confuse
Les idées peuvent devenir embrouillées. On peut perdre le fil de sa pensée. Cela se manifeste par des difficultés à tenir une conversation et à se faire comprendre. Parfois, la pensée se bloque ou est interrompue par des idées intrusives.
Croyances étranges ou non partagées
Il est courant d’observer des fausses croyances également appelées « idées délirantes ». Ce sont des productions du cerveau au cours desquelles on peut par exemple être convaincu qu’on nous suit ou qu’on nous surveille.
Modifications de la perception
Les perceptions sensorielles peuvent être modifiées : ainsi, on peut entendre, sentir, goûter ou toucher des choses qui n’existent pas. On appelle cela des hallucinations.
Modifications des émotions et de l’humeur
Il peut arriver de se sentir déprimé ou au contraire anormalement surexcité. On peut également observer des émotions atténuées, avec parfois une forme d’indifférence à ce qui nous arrive.
Modifications du comportement
Des comportements inhabituels peuvent également apparaître. On peut par exemple s’énerver sans raison ou rire à des moments inappropriés, ce qui surprend l’entourage.
Idées et conduites suicidaires
La survenue des symptômes décrits plus haut peut être à l’origine de pensées voire de passages à l’acte suicidaires.
Quels sont les signes avant-coureurs ?
Il est fréquent qu’on attribue certains signes avant-coureurs comme une conséquence de la « crise d’adolescence » ou un effet de l’usage de drogues.
Lorsque ces signes se manifestent pendant une longue période et sont responsables d’une détresse significative, ayant des répercussions sur différents domaines de la vie du patient (famille, ami·es, école, travail), il devient nécessaire d’avoir recours aux professionnel·les de santé.
Quelles sont les causes de la psychose et du premier épisode psychotique ?
Les symptômes psychotiques sont liés à un déséquilibre de certaines substances chimiques présentes dans le cerveau et en particulier la dopamine. Toutefois, il est difficile de trouver une cause unique à un premier épisode psychotique
Vulnérabilité
- Antécédents familiaux et erreurs génétiques
- Complications lors de l’accouchement
- Infections lors de la grossesse
- Traumatismes vécus dans l’enfance
Facteurs de stress
- Consommation de toxiques (cannabis notamment)
- Prescription de certains traitements pour d’autres maladies
- Évènements de vie douloureux et/ou stressants (rupture, deuil, échec scolaire…)
- Expérience d’immigration
Existe-t-il un traitement et quelles en sont les étapes ?
La psychose se traite.
Lors de la phase aiguë, ou période de crise, une hospitalisation est souvent nécessaire. Elle permet de mettre la personne à l’abri, de diminuer le stress et d’initier un traitement médicamenteux sous surveillance médicale rapprochée.
Chez la plupart des personnes, grâce aux médicaments, les symptômes s’atténuent ou disparaissent. Dès que la période de crise est passée, le patient peut sortir de l’hôpital et poursuivre son traitement en ambulatoire.
Intervenir dès les premiers signes est primordial pour un bon rétablissement.
Une intervention précoce permet de
- Diminuer la gravité de la maladie
- Favoriser l’insertion scolaire et/ou professionnelle
- Diminuer la stigmatisation
- Améliorer la qualité de vie du patient et de son entourage
- Diminuer le risque de dépression et de suicide
- Diminuer le risque de consommation de drogue
La prise en charge est globale et associe
Un traitement médicamenteux
Le ou la psychiatre va prescrire au jeune concerné un traitement appelé « antipsychotique ». Les antipsychotiques agissent sur la neurotransmission dopaminergique et permettent de réduire la transmission de la dopamine dans les régions où celle-ci est en excès pour diminuer les idées délirantes et les hallucinations.
Il existe des antipsychotiques dits de « première génération » et d’autres dits de « seconde génération ». Les antipsychotiques de première génération sont généralement prescrits dans les phases aiguës et permettent d’atténuer rapidement les symptômes psychotiques. Les antipsychotiques de seconde génération sont nommés ainsi car ils sont des versions « améliorées » des antipsychotiques de première génération : ils sont tout aussi efficaces mais mieux tolérés. C’est la raison pour laquelle ils sont privilégiés lorsqu’il s’agit de choisir le traitement de fond, celui que le patient devra prendre quotidiennement.
Il existe des effets secondaires potentiels à ces traitements antipsychotiques mais ils ne sont pas systématiques : somnolence, prise de poids, diabète, perturbations du bilan lipidique, troubles du mouvement, hypotension artérielle, problèmes sexuels, maux de tête.
On peut gérer ces effets secondaires en ajustant la dose voire en changeant de médicament.
La dose du médicament sera également ajustée en fonction du stade d’évolution de la maladie. Par ailleurs, le traitement est d’autant plus efficace qu’il est associé à d’autres approches psychosociales que nous allons détailler.
Une prise en charge psychologique
Proposer une prise en charge psychologique aux patient·es présentant un premier épisode psychotique est essentiel : cela permet en effet de construire une bonne alliance thérapeutique qui est l’un des garants du rétablissement.
Il existe différents abords possibles :
- Thérapie cognitivo-comportementale
Ce type de thérapie cible les symptômes actuels. Il a pour objectif d’identifier les pensées et/ou les comportements erronés afin de les modifier. C’est la seule approche psychothérapeutique dont l’efficacité a été scientifiquement démontrée dans la prise en charge de la psychose.
- Thérapie motivationnelle
Cet abord thérapeutique cible l’ambivalence qui empêche certains comportements problématiques d’être modifiés. Il est particulièrement efficace dans les situations d’addiction.
- Réhabilitation psychosociale
Ce type de prise en charge explore les atouts mais aussi les faiblesses de la personne afin de l’aider à renforcer ses ressources personnelles et d’être davantage partie prenante dans ses soins et dans sa vie en général. C’est l’un des garants d’une bonne réinsertion sociale.
De la psychoéducation
Ce type d’intervention a pour but de transmettre au patient une information adaptée sur la maladie, ses traitements, les facteurs de stress, les drogues, afin qu’il puisse mieux comprendre ce qu’il vit, s’approprier ces différents éléments et donc retrouver une position d’acteur dans ses soins.
Une prise en charge familiale
Dès le début des symptômes, la collaboration entre la famille et l’équipe soignante est cruciale afin d’aider le ou la patient.e à accepter le traitement et à se réadapter à la vie en société.
Parfois, la stigmatisation liée à la maladie peut être un obstacle à l’adhésion de la famille aux soins.
Les cibles de la prise en charge familiale peuvent être : l’éducation thérapeutique, la modification de certaines habitudes de vie, le développement d’habiletés relationnelles, la gestion des émotions, la redéfinition du rôle parental et des attentes à l’égard du patient.e, la réévaluation du cadre éducatif en fixant certaines limites, la redéfinition des projets et des objectifs du patient tout en favorisant son autonomie.
De l’activité physique et de bonnes habitudes alimentaires
Une bonne hygiène de vie est indispensable et peut permettre de faire la différence. Cela peut évidemment être la pratique d’un sport mais aussi de la danse, une sortie en ville ou dans la nature, ou d’autres activités qui permettent de « bouger ».
À retenir
- La psychose est une « perte de contact » avec la réalité. Environ 3 % de la population feront l’expérience d’un épisode psychotique au cours de leur vie.
- Les symptômes sont multiples et variables d’une personne à l’autre : idées délirantes, hallucinations, pensée confuse, modification des émotions, du moral, modification du comportement, idées suicidaires.
- Les symptômes psychotiques sont liés à un déséquilibre de la dopamine dans le cerveau. Il n’y a pas de cause unique. C’est l’association d’une vulnérabilité depuis la naissance à des facteurs de stress au cours de la vie qui peut aboutir à des symptômes psychotiques.
- Les traitements sont multiples : médicamenteux et psychothérapeutiques. Le traitement antipsychotique est la pierre angulaire du traitement.